Financement et fiscalité de l’urbanisme

Yann Le Corfec
Responsable du service juridique

1) Quels sont les principaux apports de la réforme des taxes d’urbanisme du 29 décembre 2010 ?

La révolution de la fiscalité et du financement, souvent annoncée depuis quelques années, n’a finalement pas eu lieu.

Un premier projet de la réforme, présenté par les services du ministère de l’Écologie et finalement abandonné, avait en effet pour ambition de taxer le potentiel constructible du terrain d’assiette d’une construction et non plus les surfaces effectivement réalisées.

Répondant à des objectifs aussi vastes et parfois contradictoires que ceux de simplification, de clarification de l’ensemble des outils de financement des équipements publics, de neutralité fiscale et d’intégration des exigences de développement durable, la réforme de la fiscalité de l’urbanisme, issue de la quatrième loi de Finances rectificative pour 2010, a institué la taxe d’aménagement et le versement pour sous-densité.

La taxe d’aménagement, plus souple dans sa mise en œuvre que la taxe locale d’équipement (TLE), comporte une part communale (ou intercommunale), une part départementale et une part « francilienne ». Elle a vocation à se substituer, dès le 1er mars 2012, à la TLE, la taxe départementale des espaces naturels sensibles, la taxe départementale pour le financement des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement, la taxe complémentaire à la TLE en Ile-de-France, la taxe spéciale d’équipement en Savoie et le programme d’aménagement d’ensemble. En revanche, la redevance pour la création de bureaux en Ile-de-France et la redevance d’archéologie préventive sont exclues du champ de la réforme.

Le versement pour sous-densité, exact contraire du versement pour dépassement du plafond légal de densité, qui restera maintenu dans certaines communes sous réserve de l’institution du versement pour sous-densité, est un nouvel outil facultatif destiné à permettre une utilisation plus économe de l’espace et à lutter contre l’étalement urbain en taxant les opérateurs ou propriétaires qui ne construiraient pas assez.

2) Comment qualifier la nouvelle fiscalité de l’aménagement ?

Au-delà d’un simple toilettage du droit des taxes et participations d’urbanisme, la réforme induit une réelle fiscalisation des outils de financement des équipements publics rendus nécessaires pour la réalisation d’opérations d’aménagement et de construction.

L’ensemble du dispositif a été conçu pour donner une très grande marge de manœuvre aux collectivités territoriales et pour pouvoir être utilisé de manière différenciée sur l’ensemble du territoire en s’adaptant à la taille, aux caractéristiques et aux politiques d’aménagement propres à chaque collectivité. Le nouveau régime des contributions d’urbanisme permet ainsi une sectorisation des taux de la taxe d’aménagement afin de garantir une adéquation entre la détermination des taux par secteur de la collectivité et ses besoins en équipements publics, au détriment des participations d’urbanisme actuelles.

Outre la fixation d’un taux de la part communale de la taxe d’aménagement de 1 à 5 %, les collectivités peuvent, dès le 1er mars 2012 et dans certains secteurs nécessitant la réalisation d’équipements publics substantiels, fixer un taux majoré jusqu’à 20 % entraînant la suppression, dans ces secteurs, des participations spécifiques comme la participation pour réseaux et voiries (PVR), la participation pour raccordement à l’égout (la PRE), ou toutes participations spécifiques.

À compter du 1er janvier 2015, cette fiscalisation sera encore renforcée par la suppression de l’ensemble des participations d’urbanisme, à l’exception des participations en zone d’aménagement concerté (ZAC), du projet urbain partenarial (PUP) et des participations pour réalisation d’équipement public exceptionnel.

3) Le choix de l’outil financier est-il plus simple ?

La réduction partielle du nombre des taxes d’urbanisme au profit de la taxe d’aménagement, associée à la suppression des participations d’urbanisme spécifiques dans les secteurs à taux majorés de taxe d’aménagement, ou dans tous les secteurs dès le 1er janvier 2015, semble simplifier le choix de l’outil financier pour les collectivités locales.

Néanmoins et depuis la réforme, la fiscalité de l’urbanisme est étroitement liée au plan local d’urbanisme (PLU). Les collectivités doivent donc engager, hors ZAC ou secteur de PUP, une réelle réflexion de modulation des taux afin de les adapter à leur stratégie de développement urbain et permettre le financement des équipements publics induits par cette urbanisation.

Cette réflexion, assurément complexe pour les collectivités ne disposant pas de services adaptés ou de capacité financière d’études suffisante, devra être mise en œuvre par les collectivités, à peine de ne pouvoir, à terme, recourir aux participations d’urbanisme qu’elles utilisaient habituellement pour financer les équipements publics rendus nécessaires par la réalisation d’opérations d’aménagement ou de construction.

En revanche, le choix du recours au versement pour sous-densité, destiné à inciter les opérateurs à réaliser des constructions d’une densité minimale fixée par les collectivités, risque d’être limité par son caractère facultatif, la complexité de sa mise en œuvre et le rejet, assez partagé par les élus locaux, de la nécessité d’économie foncière et de densification, objectifs pourtant affichés par le gouvernement en conclusion des travaux des groupes de travail «urbanisme de projet» mis en place par le Secrétaire d’État au Logement et à l’urbanisme, Benoist Apparu, en juin 2010.

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