Quelles divisions foncières en 2017 ?

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La technique des divisions foncières est devenue un incontournable à maîtriser pour le montage des opérations immobilières impliquant plusieurs opérateurs.

 

1. Dans quel contexte s’inscrit la technique des divisions foncières? 

 

Depuis la réforme engagée par l’ordonnance n°2005-1527 du 8 décembre 2005 et son décret d’application du 5 janvier 2007, entrée en vigueur le 1er octobre 2007, toute division foncière en vue de bâtir est susceptible d’entrer dans le champ d’application du lotissement et, selon la localisation du terrain (site classé, secteur sauvegardé) ou selon les travaux à réaliser, dans le champ du permis d’aménager et toutes les contraintes qui s’y attachent (règles de commercialisation encadrées, obligation de réaliser les travaux d’équipement…).

Échapper au lotissement soumis à permis d’aménager devient alors la règle.

C’est ainsi qu’ont pu se développer des procédures alternatives au lotissement. En effet, l’article R. 442-1 du Code de l’urbanisme a prévu les hypothèses dans lesquelles la procédure de lotissement ne trouve pas à s’appliquer, dont les deux principales : le permis de construire valant division et la division primaire.

Pour autant, ces procédures n’apparaissent pas toujours parfaitement adaptées aux projets. Faire entrer les opérations au chausse-pied dans une procédure alternative au lotissement peut devenir un véritable casse-tête dans la conduite du projet et entraîner un dévoiement des objectifs poursuivis par le législateur.

Il faut rappeler qu’historiquement, le lotissement est une procédure de droit privé utilisée par les propriétaires privés pour lotir leurs terrains et ainsi mieux les valoriser. Ce n’est qu’à partir de début du XXe siècle que les pouvoirs publics ont commencé à s’y intéresser pour éviter un développement anarchique des villes et s’assurer que les constructions édifiées sur ces terrains bénéficiaient de bonnes conditions de raccordement aux réseaux publics d’assainissement, d’eau potable puis d’électricité (loi du 14 mars 1919 et loi du 19 juillet 1924).

Plus tard dans le cadre de la loi du 15 juin 1943, dans une logique de protection des acquéreurs de terrains, le législateur est venu réglementer les conditions dans lesquelles la commercialisation des terrains pouvait intervenir afin de prévenir d’éventuelles ventes de terrains non raccordés aux réseaux.

C’est ainsi dans une logique de protection des consommateurs que les pouvoirs publics ont imposé qu’aucune commercialisation des terrains ne puisse intervenir avant la délivrance de l’autorisation de lotir et exigé d’une part que les terrains ne puissent être cédés et d’autre part que le permis de construire ne puisse être délivré avant que les travaux desservant le lot vendu n’aient été réalisés, sauf fourniture d’une garantie financière d’achèvement.

Ce régime juridique, issu principalement de la loi du 31 décembre 1976 et son décret d’application du 26 juillet 1977, n’a pas disparu avec la réforme entrée en vigueur en 2007 et l’instauration d’un régime d’autorisation d’urbanisme dual : permis d’aménager ou déclaration préalable selon les situations.  Le régime contraignant de l’arrêté de lotir s’applique désormais aux divisions soumises à permis d’aménager.

Certes un assouplissement a été introduit par le décret n°2012-274 du 28 février 2012 en permettant que le permis de construire ne portant pas sur une maison d’habitation individuelle puisse être délivré avant que les travaux d’aménagement prévus par le permis d’aménager aient été achevés dès lors que les travaux autorisés ne sont pas engagés avant l’achèvement des travaux d’aménagement desservant le lot (article R. 442.18 c) du Code de l’urbanisme).

 

2. Quelles difficultés sont posées en pratique ? 

 

L’impossibilité de signer un avant-contrat sur les terrains avant la délivrance du permis d’aménager constitue un véritable frein à l’utilisation du lotissement soumis à permis d’aménager. Cette interdiction est d’autant moins compréhensible lorsque la division foncière n’est soumise à permis d’aménager qu’en raison de sa localisation.

En effet, dès lors qu’un terrain à diviser est situé dans un secteur sauvegardé ou d’un site classé ou en cours de classement, il doit être précédé d’un permis d’aménager. Ce champ d’application du permis d’aménager a même été étendu de manière significative par le décret n°2017-456 du 29 mars 2017 qui prévoit que les divisions de terrains situés aux abords des monuments historiques sont également soumises à permis d’aménager.

Un groupe d’experts au sein du GRIDAUH avait pourtant proposé, dans le cadre d’un rapport intitulé Pour une réforme du droit des lotissements, qu’un régime distinct soit proposé selon que l’acquéreur du lot à bâtir est un particulier ou un professionnel de l’immobilier, reprenant ainsi la distinction entre le secteur protégé et le droit commun : « Le découplage ainsi réalisé entre le champ du lotissement et la protection du consommateur immobilier pourrait également amener à une réflexion d’ensemble sur l’intérêt de maintenir, pour les professionnels de l’immobilier, dans leurs relations réciproques, un régime de protection qui paraît, à leur égard inadapté et source de lourdeur. »

On comprend en effet assez bien ce régime contraignant et protecteur lorsque les acquéreurs sont des personnes physiques. En revanche, on pourrait aisément considérer que des relations contractuelles librement négociées entre vendeurs et acquéreurs professionnels puissent organiser les conditions d’équipement des terrains permettant ainsi la conclusion de promesses de vente plus en amont de l’obtention de l’autorisation de lotir.

Sous réserve de lever cette difficulté, il nous semble en effet que la procédure de lotissement soumise à permis d’aménager permette une véritable appréciation globale d’une opération immobilière complexe dans la durée : appréciation globale des règles d’urbanisme (sauf opposition du PLU ou du document d’urbanisme en tenant lieu) , travaux d’équipement réalisés en vertu d’une autorisation spécifiques, définition plus libre de l’assiette du permis d’aménager, gestion dans le temps des rapports entre les colotis lorsque des équipements communs le justifient…

Si les procédures dérogatoires utilisées pour contourner le lotissement soumis à permis d’aménager peuvent s’avérer particulièrement pertinentes dans certains cas, elles ne sont pas toujours adaptées aux caractéristiques des opérations projetées, notamment lorsque des travaux d’équipements communs sont envisagés.

 

3. Focus sur les techniques alternatives au lotissement 

 

a) Le permis de construire valant division

 

Première procédure utilisée, le permis de construire valant division prévu par l’article R. 431-24 du Code de l’urbanisme est une autorisation qui regroupe l’autorisation de diviser et celle de construire. Traditionnellement utilisée pour les opérations en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) impliquant une division foncière au fur et à mesure des constructions, elle s’est également développée dans les opérations de co-promotion impliquant des divisions foncières.

Présentant le même avantage que le lotissement s’agissant de l’application des règles d’urbanisme à l’échelle de l’assiette de l’autorisation, elle s’avère moins adaptée lorsque la totalité du projet n’est pas connue dès le dépôt de la demande de permis de construire.

En effet, le recours au permis de construire valant division suppose que le pétitionnaire connaisse dès le départ le détail de son projet puisque l’autorisation porte certes sur la division, mais également sur les constructions à édifier. En pratique, et notamment lorsque l’opération présente une certaine taille ou une certaine complexité, il n’est pas toujours possible de fournir toutes les pièces relevant d’un permis classique.

 

b) La division primaire : la nouvelle procédure de droit commun ?

 

Seconde procédure utilisée, la division primaire prévue à l’article R. 442-1 du Code de l’urbanisme tend à devenir actuellement, tant elle est simple et facile à mettre en place, la procédure de droit commun pour procéder à des divisions foncières.

Rappelons que cette procédure consiste à permettre la division par un propriétaire au profit d’un tiers ayant obtenu un permis de construire. Il suffit ainsi que l’acquéreur projeté ait obtenu un permis de construire avant la vente pour que la division foncière puisse intervenir. Le recours à cette procédure n’est pas sans poser quelques questions.

En premier lieu, même si le texte ne le prévoit pas expressément, il est hautement recommandé de prévoir que la cession n’interviendra que lorsque le permis de construire aura acquis un caractère définitif (c’est-à-dire qu’il sera purgé de tous les délais de recours et de retrait).

À défaut, si le permis de construire venait à être annulé après la vente, cette dernière pourrait être remise en cause puisque l’article L. 480-15 du Code de l’urbanisme prévoit que : « les ventes ou locations de terrains intervenues en méconnaissance des dispositions du titre IV du présent livre peuvent être annulées à la requête de l’acquéreur, du maire ou du représentant de l’État dans le département aux frais et dommages du lotisseur. Toutefois, les ventes et locations des parcelles pour lesquelles le permis de construire a été accordé ne peuvent plus être annulées ».

En deuxième lieu, si on pensait avoir réglé la question de l’assiette du permis de construire déposé dans le cadre d’une procédure de division primaire, force est de constater qu’il existe encore des divergences d’interprétation en jurisprudence.

En effet, c’est sciemment que le pouvoir réglementaire a rédigé l’article R. 442-1 a) en retirant la référence à la partie de l’unité foncière. À la lettre du texte, il est donc désormais prévu que n’entre pas dans le champ d’application du lotissement : « a) Les divisions en propriété ou en jouissance effectuées par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d’aménager portant sur la création d’un groupe de bâtiments ou d’un immeuble autre qu’une maison individuelle au sens de l’article L. 231-1 du code de la construction et de l’habitation ».

Pour autant, un arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 13 novembre 2013 a considéré « que la demande ne devait pas être instruite au regard de l’unité foncière d’origine, mais seulement au regard de la partie du terrain devant recevoir le projet » (CAA, 12 novembre 2013, req. n°13LY00584).

Si nous pensons aujourd’hui, à l’appui de réponses ministérielles (Rép. min. n°65630, JOAN Q 6 juillet 2010, p.7649) et de décisions jurisprudentielles (Cf. CAA Versailles, 29 mars 2007, req. n°06VE01147), ayant confirmé cette position, que la demande de permis de construire doit en principe être déposée sur l’assiette foncière avant division, cette position ne pourra pas être considérée comme parfaitement sécurisée tant que le Conseil d’État ne se sera pas prononcé sur le sujet. Or, dans la pratique, une telle incertitude provoque une insécurité juridique certaine dans les opérations immobilières, d’autant que la situation des permis de construire modificatif n’est pas non plus clairement définie.

En effet, dans le cadre de la division primaire, une fois le permis de construire définitif obtenu sur l’assiette avant division, seule une partie du terrain d’assiette d’origine du permis de construire est cédée à l’acquéreur. Dès lors, dans l’hypothèse où ce dernier souhaiterait en cours de construction déposer une demande de permis de construire modificatif, il se posera la question de savoir sur quelle assiette devrait-on déposer la demande de permis modificatif ?

À notre sens, c’est forcément sur l’assiette réduite que la demande de permis de construire devra être déposée, ce qui n’est pas sans soulever des difficultés si la modification envisagée ne peut pas être autorisée eu égard au fait que l’emprise foncière a été réduite (on pense notamment aux règles d’emprise au sol ou d’espaces verts).

Certains praticiens ont pu proposer de prévoir que le propriétaire initial autorise dès la promesse de vente l’acquéreur à déposer toute demande de permis de construire modificatif sur l’assiette avant division. S’il s’agit d’une idée pragmatique et intéressante, cette solution pose n’est pas sans soulever des difficultés si le vendeur envisage lui-même de réaliser un autre projet sur le reliquat non vendu ou de le céder.

En troisième lieu, la technique de la division primaire est tellement simple à mettre en place qu’elle s’est développée considérablement, y compris pour permettre des divisions multiples de terrains. Par exemple, le propriétaire d’une unité foncière peut aujourd’hui, au travers de plusieurs divisions primaires, promettre de vendre la totalité de son terrain en lots, à plusieurs acquéreurs, les divisions pouvant intervenir concomitamment.

Il doit tout de suite être précisé que cette pratique n’est pas interdite par les textes et qu’elle n’a pas été sanctionnée par la jurisprudence. Toutefois, elle peut poser des difficultés pratiques notamment lorsque les divisions à intervenir supposent que soient mises en place des servitudes de passage ou réalisés des travaux de desserte.

Dans ce cadre, l’administration (si elle instruit le permis de construire sur la totalité de l’unité foncière d’origine) n’a pas la capacité matérielle de vérifier que les constructions sont effectivement desservies (aucun plan de division ne doit être fourni en cas de recours à la division primaire) et ces aspects ne seront pas contrôlés par l’administration. La procédure de division primaire ayant été exclue pour les opérations de division en vue de la construction d’une maison individuelle, on peut considérer que la finalité de la réglementation des lotissements n’est pas déviée.

On peut regretter que cette procédure ne permette pas, si elle doit devenir la procédure de droit commun des divisions foncières, d’avoir une vision globale du projet.

 

Pour en savoir plus, venez assister les 13 et 14 juin à notre conférence d’actualité Quelles divisions foncières en 2017 ?

Avec la présence exceptionnelle de Jérôme Trémeau, Professeur à l’Université d’Aix Marseille, de Malicia Donniou, du CRIDON de Lyon et de bien d’autres encore… 

 

[/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row][vc_column][dt_quote]Malicia Donniou
Avocate associée
Cabinet Ginkgo Avocats, groupe Cheuvreux[/dt_quote][/vc_column][/vc_row]

2 Commentaires

  • Bonjour,

    J’ai un terrain de 1280m²,
    Une maison de 148m² habitable (emprise au sol de 205m²) construite sous un RNU (le PLU n’étant pas encore en place au moment du dépôt du PC).
    Actuellement le PLU est en place, autorisant une emprise au sol de 0.2 (qui équivaut à 256m² pour mon terrain)

    Si je souhaite faire une division parcellaire de 300m².
    L’emprise au sol de la nouvelle parcelle de 300m² aura- t-elle autorisation d’une emprise au sol de 0.2 (soit 60m²)?
    Ou sera-t-elle imputé de la maison déjà construite et ne devra pas excéder 51m² (256-205)?

    Cordialement,

Répondre à Emma