Jurisprudence – Novembre 2016

Brèves de jurisprudence urbanisme

La sélection du mois
Les dernières décisions résumées par la rédaction du BJDUonline.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT

CEDH 6 octobre 2016, n°40886/06

Servitudes d’inconstructibilité sur le littoral : un obstacle au droit de propriété ?

La Cour européenne des droits de l’homme a eu à se prononcer sur une affaire portant sur des terrains situés sur notre littoral méditerranéen. Ces terrains en bordure littorale (bande des 100 mètres) ont été frappés d’une interdiction de construire au regard de leur situation géographique en 1986. Les propriétaires ont alors lancé une procédure d’indemnisation devant le juge administratif à la suite de la servitude d’urbanisme prononcée à l’égard de leurs terrains. Leurs demandes ayant échoué devant la plus haute juridiction administrative, ils ont porté l’affaire devant la CEDH.

Comme à son habitude, la Cour estime qu’une mesure d’ingérence publique doit respecter le principe de légalité et adopter un équilibre entre l’intérêt général et les droits fondamentaux de l’individu.

Or l’ingérence relevant d’une politique générale d’aménagement du territoire et de protection de l’environnement permet au propriétaire d’être indemnisé de son préjudice, s’il supporte une charge exorbitante, hors de proportion avec l’objectif d’intérêt général poursuivi. La CEDH a généralement une interprétation très large de l’équilibre entre la décision des autorités nationales qui reflète l’intérêt général et les droits fondamentaux des individus, y compris le droit à la propriété. Elle a donc de nouveau rejeté la demande des requérants.

CE 12 octobre 2016, req. n°387308

Quid de l’articulation entre l’adoption d’un PLU et la participation d’un élu intéressé au vote ?

Le Conseil d’État estime qu’une délibération déterminant des règles d’urbanisme applicables à une commune n’est pas frappée d’illégalité dans le cas où un élu municipal intéressé par l’une des règles a participé aux travaux préparatoires, aux débats et au vote.

À ce titre, les juges considèrent que ladite délibération est illégale si elle prend en compte l’intérêt personnel du conseiller municipal intéressé. Le Conseil d’État s’estime également compétent pour se prononcer sur une demande d’autorisation d’occupation des sols, ce qui lui permet, le cas échéant, de surseoir à statuer afin que le PLU soit régularisé.

Cass Civ 3e, 6 octobre 2016, pourvoi n°15-25.154

Quid du changement d’affectation d’un immeuble préempté ?

En l’espèce, l’État a exercé son droit de préemption sur la parcelle d’un propriétaire agricole à un prix convenu entre les parties. Cette même parcelle a ensuite fait l’objet de nombreuses reventes et acquisitions, jusqu’à ce qu’elle soit cédée à des particuliers.

Le propriétaire initial a donc effectué un recours indemnitaire auprès des autorités publiques ayant changé l’affectation du bien préempté.

La Cour de cassation a toutefois rejeté le pourvoi du demandeur. En effet, elle considère que le titulaire du droit de préemption n’avait pas l’obligation de proposer la rétrocession du bien préempté à l’ancien propriétaire en cas de changement d’affectation. Aucune faute n’a donc été commise par l’autorité publique titulaire du droit de préemption.

En revanche, la loi ALUR prévoit que le titulaire du droit de préemption décidant d’utiliser ou d’aliéner un bien acquis depuis moins de cinq ans par exercice de ce droit, doit informer de sa décision les anciens propriétaires et leur proposer l’acquisition de ce bien en priorité. Ainsi, à l’aune de la loi ALUR, la décision de la Cour de cassation aurait été bien différente.

Les brèves de la revue BJDU
L’actualité jurisprudentielle du droit de l’urbanisme sélectionnée par le comité de rédaction du BJDU.

LOIS ET RÈGLES GÉNÉRALES D’URBANISME

CE 20 juin 2016, Association citoyenne intercommunale des populations concernées par le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes et autres, req. nos 400364 et 400365

La consultation locale des électeurs sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est-elle légale ?

Consultation préalable des électeurs sur un projet susceptible d’avoir une incidence sur l’environnement (nouvel article L. 123-20 du Code de l’environnement) – Possibilité d’organiser la consultation postérieurement à la décision de l’État de réaliser le projet et alors qu’aucune autorisation n’est plus nécessaire à cette réalisation – Oui – Objet de référendum – Projet déclaré d’utilité publique – Oui – Aire de la consultation – Département lorsque la préfecture est le chef-lieu de l’enquête – Oui.

Un référendum, sur un projet qu’il appartient à l’État d’autoriser, peut être organisé après la déclaration d’utilité publique et alors même que toutes les autorisations nécessaires auraient d’ores et déjà été délivrées. Le référendum peut légalement porter sur le projet tel que déclaré d’utilité publique dès que le gouvernement n’a ni décidé, ni manifesté l’intention d’en modifier les caractéristiques. L’aire de la consultation est le département, dès lors que le chef-lieu de l’enquête est la préfecture du département dans lequel doit être réalisé le projet.

POS/PLU

CE  6 juillet 2016, M. G., req. n°387814

Comment apprécier la limite de propriété pour l’application des règles de retrait par rapport aux limites séparatives ?

Permis de construire – Légalité interne – Légalité au regard de la réglementation locale – PLU. Implantation des constructions en limite séparative – Limitation de la longueur sur une limite de propriété – Notion de limite de propriété – Limite séparant la parcelle litigieuse de l’ensemble des propriétés qui la jouxtent. Existence : Non – Limite séparative avec la propriété voisine concernée – Existence : Oui.

Dès lors que le PLU se réfère, pour autoriser l’édification d’une construction en limite séparative sur une longueur qu’il fixe en proportion de celle de la limite de propriété, il convient de prendre en compte la longueur de la seule limite séparative avec la propriété voisine concernée et non la longueur totale de la limite séparant la parcelle litigieuse de l’ensemble des propriétés qui la jouxtent.

LOTISSEMENTS

Cass. civ. (3e ch.) 21 janvier 2016, pourvoi n°15-10566

Les clauses d’un cahier des charges de lotissement peuvent-elles limiter la constructibilité des lots ?

Documents du lotissement – Cahier des charges – Nature contractuelle – Oui – Contenu – Restriction de constructibilité – Effet entre colotis – Oui – Application de l’article L. 442-9 – Caducité (non).

Le cahier des charges, quelle que soit sa date, constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues.

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