Ville de demain et densification

Dominique Lancrenon
Architecte-Urbaniste

1) Face aux objectifs du Grenelle, en quoi la densification est-elle devenue un enjeu pour construire la ville de demain ?

Les objectifs du Grenelle nous engagent à une qualification plus grande de l’environnement à travers la maîtrise de l’énergie, la gestion de l’eau économe, le recyclage des déchets, la mise en valeur des patrimoines et de la biodiversité et la réduction des pollutions et des gaz à effet de serre. Ces objectifs peuvent être atteints à condition de réduire les besoins de déplacement en rapprochant l’habitat, les activités et les loisirs : la densification permet de réintroduire la mixité dans le tissu urbain qui, sous l’influence de la domination de la voiture dans les déplacements, a eu tendance à ségréger les fonctions et les quartiers et à développer l’étalement urbain.

En parallèle, la protection des espaces naturels et de la biodiversité engage à ce que la croissance attendue des villes se fasse sur les espaces déjà urbanisés qui se transforment et se requalifient. À travers leur requalification, les objectifs de réduction de consommation d’énergie, de développement de la mixité urbaine et de l’efficacité des transports peuvent être atteints.

2) La densification ne présente-t-elle pas des dangers ? Comment densifier tout en protégeant le cadre de vie ?

La densification se conçoit comme un gage de la qualité du cadre de vie : elle permet une mutualisation des services attendus tant pour les activités, que pour l’habitat, les équipements sociaux, culturels, de loisirs, ainsi que les commerces. Paris est reconnu comme une des villes les plus belles du monde et offre, dans tous ses quartiers, une densité d’habitat, de services, d’activités, de commerces, en même temps qu’un haut niveau de possibilité de déplacements, qui font que la qualité de vie y est particulièrement élevée.

La protection du cadre de vie passe par une attention très forte à la qualité de la composition urbaine qui articule harmonieusement les différentes fonctions et permet de véritables mutualisations de services et d’espaces collectifs : parcs, équipements et systèmes de transports. Elle passe aussi par l’intégration de la participation citoyenne qui permet de définir, dans le processus du projet urbain, le niveau de qualité de vie attendu, les services à mutualiser ainsi que le niveau d’investissement attendu.

3) Quelle nouvelle urbanisation ?

La nouvelle urbanisation peut se développer sur les emprises des sites anciennement industriels ou s’ouvrir sur les rives urbaines des fleuves et des canaux des villes, ainsi que de nombreuses villes et métropoles l’ont engagé : Hambourg sur son port, Berlin sur les rives de la Spree et le Tempelhoof, Londres sur les rives de la Tamise, Paris autour de ses futures gares et dans ses grands projets le long de la Seine, Nantes, Bordeaux, Lyon, Lille…

D’autres projets s’engagent dans la régénération urbaine des centres anciens des villes européennes qui recèlent un potentiel de requalification économique considérable. Ainsi, des villes comme Madrid, Bilbao et Barcelone ont engagé des politiques fortes de revitalisation des centres anciens qui engagent une mixité plus grande et une reconquête des tissus et utilisent la densité bâtie historique.

4) Comment imaginez-vous la ville idéale ?

La ville idéale est multiple à l’image de la diversité des cultures et des territoires. Sur notre planète ou d’ici quarante ans, nous serons trois milliards de plus qu’aujourd’hui à vivre dans des villes, le modèle « idéal » est celui où un accès simple aux services urbains est offert à tous : écoles, accueil de la petite enfance, loisirs, espaces verts et parcs, équipements sportifs et culturels, commerces…

La ville idéale est aussi celle qui permettra, à travers son organisation complexe, d’être auto-suffisante en énergie, en gestion de l’eau, des déchets et non polluante. Des villes européennes sont engagées dans cette voie et sont aujourd’hui « modèles ». Copenhague, par exemple, s’engage à être neutre en CO2 d’ici 2040.

Cette qualité de vie que les villes sont en train de créer pour demain est aussi fondatrice d’une nouvelle ère de l’économie de services et d’échanges, post- industrielle, où les notions d’usage se valorisent avec les apports d’une gouvernance qui s’organise localement.

1 Commentaire

  • Bonjour,
    Nous sommes un groupe d’étudiants aux Mines ParisTech ISIGE qui étudiont un cas concret de controverse environnementale : le projet de construction des tours d’Issy les Moulineaux. Cette controverse nous a amené à nous poser des question concernant l’urbanisation et la densification des villes. Dans le cadre de ce projet nous cherchons à interviewer des acteurs de cette polémique ou des experts dans les thèmes abordés.
    Ainsi, pensez vous nous pourrions nous rencontrer (nous sommes plusieurs à habiter Paris) ces jours prochains ? N’hésitez pas à me contacter si vous désirez plus d’informations.

    Par avance merci,

    Lucile HENRY
    06.51.63.25.24

Laisser un commentaire