Paris à vélo

ELAN

Christophe Najdovski
Adjoint à la Maire de Paris en charge des transports, des déplacements, de la voirie et de l’espace public

La crise sanitaire nous a donné deux leçons en termes de mobilité : d’une part, pour désaturer les transports en commun, le vélo est, avec le télétravail, une réponse adaptée ; d’autre part, il est possible de transformer une ville en un temps record lorsque toutes les volontés convergent.

De nombreuses villes en France et dans le monde ont considéré que le vélo était une des réponses aux défis posés par la crise sanitaire, de Berlin à Bogota, en passant par Oakland. Ce sont les pays du Sud, notamment la Colombie qui, les premiers, ont mis en place des aménagements cyclables transitoires. En une nuit, Bogota a déployé 80 km de pistes cyclables. Inconcevable lorsque l’on suit les procédures urbanistiques en France, possible dans ces pays habitués à faire vite et avec peu de moyens.

À Paris, nous avons souhaité éviter un retour et un report massifs sur la voiture individuelle qui, en plus de polluer et d’aggraver les symptômes du COVID, aurait été physiquement impossible. Cela aurait créé des embouteillages montres. Il ne s’est donc pas agi de favoriser un mode de déplacementplutôt qu’un autre, mais de permettre au plus grand nombre de se déplacer dans de bonnes conditions sanitaires.

La Ville de Paris a ainsi décidé de créer 50 km de pistes cyclablesprotégées d’ici à l’été. Ces pistes visent à compléter le réseau déjà existant, notamment en se connectant aux axes du REVe, le Réseau Express Vélo. Nous avons donc finalisé les axes Est/Ouest et Nord/Sud, qui suivent respectivement la ligne 1/RER A et 4/RER B. La ligne 13 a également fait l’objet d’une attention particulière puisqu’elle est la plus fréquentée, notamment sur son tronçon. Cette semaine notamment, beaucoup de travaux sont réalisés pour doubler cette ligne. Nous venons, par exemple, de créer deux larges pistes cyclables sur le pont de la Concorde.

L’idée qui préside à la conception de ces aménagements est de créer des pistes non seulement sécurisées, mais surtout sécurisantes, pour attirer de nouveaux cyclistes. Le but n’est pas de faire plaisir à ceux qui font déjà du vélo, mais de permettre à ceux qui le souhaitent ou en ont besoin de pouvoir franchir le pas. Nous avons bien sûr pris soin de conserver toutes les caractéristiques des rues en réorganisant les livraisons, en créant de nouveaux quais bus… afin que la ville continue à vivre. L’idée n’est pas de créer une ville seulement faite pour que les vélos y circulent, mais pour que des usages autres que de simples flux s’y développent.

Et les résultats sont là. La pratique explose. Elle a progressé de 50% par rapport aux niveaux de fréquentations pré-confinement, avec beaucoup de nouveaux cyclistes. Les pistes provisoires sont un véritable succès et nous aurons à cœur de les pérenniser.

C’est une victoire culturelle, puisque le vélo n’est plus considéré comme l’apanage de quelques-uns, mais comme une véritable solution de mobilité. Cela a été rendu possible par un fort engagement de l’État, en la personne du Préfet de Région qui a impulsé une véritable dynamique, en mettant tous les acteurs autour de la table et en poussant pour une mise en œuvre rapide du réseau cyclable d’urgence. L’État a fortement allégé les procédures d’urbanisme afin que ces aménagements puissent être réalisés en quelques jours plutôt qu’en quelques mois.

Les associations ont joué un rôle clé dans la réussite de ce projet. Elles nous ont présenté un projet  abouti et désirable, le RER V. Ces associations, tout comme le Préfet de Région, ont le respect et la confiance de l’ensemble de parties prenantes. Elles ont facilité le dialogue et proposé des solutions pertinentes.

Cette période montre qu’il est possible d’aller vite et de faire de grandes choses lorsqu’on se met ensemble autour d’une table. Elle démontre que la transition écologique des territoireset la voie que nous traçons avec Anne Hidalgo est la bonne, elle révèle toute sa pertinence dans cette période. Je souhaite que la prochaine mandature soit l’occasion d’aller encore plus loin, en finissant le réseau vélo régional et en utilisant l’espace public ainsi dégagé pour développer de nouveaux usages, des échanges, du lien social et de la convivialité. En clair, que cette transition qui est le seul mode de développement encore soutenable soit également un projet de société souhaitable.